Intoxication et empoisonnement

L’intoxication et des empoisonnements délibérés sont très présente chez les rapaces en France et représentent une menace importante pour le Gypaète barbu. Les espèces nécrophages comme les vautours sont particulièrement concernées, et même lorsqu’elles ne sont pas directement visées, elles font les frais des empoisonnements de cadavres à destination des prédateurs comme le Loup gris (Canis lupus lupus). Ces menaces sont difficiles à appréhender chez les grands rapaces car il existe de nombreux polluants (phytosanitaires, métaux, polluants organiques persistants, médicaments…), de d’expositions différentes (aigües, chroniques) et selon les contextes (environnemental, accidentel, malveillance). Les intoxications ne conduisent pas systématiquement à la mort des oiseaux mais peuvent gravement affecter leur métabolisme (croissance, reproduction, alimentation) en ayant des effets sur leurs tissus, leur comportement et leur vigilance, les exposants à des accidents divers (noyades, collisions, percussions, prédations). Ces expositions toxiques ont inévitablement des impacts sous-estimés sur les paramètres reproducteurs et sur la dynamique de leur population.

Le saturnisme, l’intoxication au plomb, est reconnue comme étant l’une des menaces majeures pour les rapaces charognards au niveau mondial. Les études démontrent que le plomb de chasse est l’une des sources principales de saturnisme chez les grands rapaces mais que la contamination environnementale peut jouer un rôle plus ou moins important localement. 70% de plus de 250 rapaces retrouvés morts de 2025 à 2019 en Europe Occidentale, et analysés, ont été exposés à des doses anormales de plomb (Bassi et al. 2021). L’exposition la plus importante au plomb de chasse se fait par une absorption secondaire, en se nourrissant des carcasses contenant des fragments de plomb ou simplement des teneurs élevées dans leurs tissus. Les déchets de chasse (viscères) laissés sur le terrain, les ongulés blessés par balle et non retrouvés et les tirs non-létaux représentent un risque majeur d’intoxication au plomb.

 

Dans le cadre du Plan National d’Action (PNA) du Gypaète une veille toxicologique a été mise en place et les cadavres sont systématiquement analysés et autopsiés même si la cause de la mortalité parait évidente. On utilise également d’autres espèces dites « sentinelles », en plus grand nombre et partageant l’aire de répartition du Gypaète (exemple : d’autres espèces vautours, aigle, milan …). Ils font office d’indicateurs de l’état sanitaire du milieu et les analyses portées sur leurs cadavres permettent d’en savoir davantage sur les menaces liées au poison qui pèsent sur le Gypaète Barbu. La lutte contre l’empoisonnement passe aussi par un volet de sensibilisation important : sensibilisation des réseaux d’observateurs, des agents forestiers et des acteurs locaux. Quant au risque du saturnisme par le biais de la chasse, une transition vers l’utilisation des munitions sans plomb est une des solutions.

 

Référence :

Bassi, E., Facoetti, R., Ferloni, M., Pastorino, A., Bianchi, A., Fedrizzi, G., Bertoletti, I. and Andreotti, A., 2021. Lead contamination in tissues of large avian scavengersin south-central Europe. Science of The Total Environment, 778, p.146130